L'air frais de la nuit vint caresser la jeune fille, qui soupira de contentement. Bellatrix avait réussi - non sans mal - à se glisser hors du château.
Réveillée par un cauchemar, elle n’avait pas réussi à de rendormir et avait pensé qu’un peu d’oxygène lui ferait le plus grand bien. Elle s’était rhabillée en vitesse, avait pris son sac, et s’était faufilée dehors en passant par les cuisines. A cette heure-ci, il était facile de déjouer la surveillance de Rusard et des professeurs noctambules.
Il y avait du vent ce soir-là, mais Bellatrix ne ressentait pas le froid, seulement l’ivresse de l’interdit. Elle était dehors, et la nuit était tellement belle ! La jeune fille se sentait heureuse, terriblement bien, elle aurait voulu être essoufflée, danser sur l’herbe jusqu’à tomber par terre, terrassée par la fatigue.
« Après tout, pourquoi se priver, il n’y a personne, et tout est si parfait ce soir… »
Une petite voix malicieuse dans sa tête la poussait, l’exhortait même à faire tout cela. Oubliant soudain le maintien et la dignité inhérente à la famille Black, Bellatrix se mit à courir dans le parc vide, sans s’arrêter. Elle était maintenant parfaitement réveillée et sentait le vent fouetter son visage. Elle s’arrêta, en plein milieu du parc et commença à danser, une vieille danse irlandaise oubliée depuis des générations. Son sourire se transforma en éclat de rire, et ses pieds, soudain maladroits, s’entremêlèrent. Elle tomba dans l’herbe, sans continuer de rire. Bellatrix était dans un tel état d’euphorie que tout lui semblait merveilleux, le parc, les lumières du château au loin, et le lac noir.
La jeune femme resta un long moment allongée sur le dos à contempler les étoiles.
Grâce aux cours d’astronomie, elle était capable de nommer chaque constellation de ce carré du ciel, mais ce n’était pas drôle. Elle s’amusa à déconstruire les constellations, pour en inventer de nouvelles, remplies d’un sens qu’elle seule connaissait.
Tremblant soudain, elle sortit de son sac un petit pot en verre dans lequel elle avait enfermé une flamme qui lui fournissait de la chaleur.
Bellatrix glissa le pot sous sa cape, contre son ventre et continua son observation.
De nuit, le parc n’était plus du tout le même, et c’était comme si elle voyait les lieux pour la première fois de sa vie. Les arbres qui étaient si accueillants de jours semblaient maintenant tordus et recroquevillés, prenant la forme d’un quelconque monstre de contes. Le bruit du vent dans l’herbe ressemblait à s’y méprendre à quelque chant d’une créature inconnue et du lac noir pouvait sortir d’un instant à l’autre un être visqueux et mal intentionné.
Un délicieux frisson lui parcourut l’échine. Bellatrix aimait jouer à avoir peur. L’espace d’un instant, elle imagina autour d’elle des nuées de bestioles grouillant et rampant, prêtes à lui sauter dessus dès qu’elle tenterait de se lever, des vampires et des loup-garous cherchant à dévorer sa chair tendre.
Elle ferma les yeux, s’imaginant maintenant défaire à elle seule toutes les horreurs de la nuit, botter les fesses des vampires et mordre les loup-garous. Un sourire de contentement passa sur ses lèvres.